Devenir Planneur Stratégiste
Par Oskar Bjorn Phuong-
Publié le : 27/11/2015
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Lecture 5 min
" Très peu de personnes deviennent stratégistes compétents à la sortie de l'école car cela demande un peu de vécu "
1) Bonjour. Pourriez-vous commencer par vous présenter succinctement (parcours, formation, années d’expérience) ?
Bonjour, Je m’appelle Davidssen Oskar Bjorn Phuong, j’ai 35 ans et j’habite Le Kremlin Bicêtre. Mon parcours est un peu fragmenté. J’ai fait mes études au Celsa avec une spécialité marketing/publicité. Je me destinais à devenir concepteur rédacteur ayant depuis mon adolescence l’envie de travailler pour Nike au sein de l’agence Wieden+Kennedy. J’ai donc réalisé tous mes stages en agence à Paris : Euro RSG, D’Arcy/Leo Burnett. A la sortie de ma formation, je n’avais plus forcément la motivation de continuer dans cette voie et ma passion pour la musique a pris le dessus. J’ai donc décidé de monter mon label indépendant tout en continuant avec de nombreux métiers dits alimentaires. En 2007, des raisons personnelles m’ont incité à déménager sur Londres où j’ai rapidement intégré une agence media. J’avais un rôle transversal entre la relation client, la création de contenu et la réflexion stratégique. Je suis resté 4 ans et demi en agence media à Londres puis sur Paris.
Il y a 3 ans, j’ai décidé de prendre le statut de freelance et je travaille aujourd’hui de manière régulière pour des marques de luxe (Chanel), divisions innovations de grands groupes (Pernod Ricard) ou agences (Group M).
2) En quoi consiste votre métier ?
Cela varie selon les demandes du client mais il englobe globalement toutes les étapes clés de la réflexion stratégique autour de la marque en vue de la création d’un produit service ou la mise en place d’une campagne publicitaire/media. Je peux ainsi me retrouver à l’autre bout du monde à interroger des spécialistes dans le cadre d’une recherche spécifique ou dans une salle décorée de post-it pendant 3 jours. Mon objectif étant d’avoir une vision pertinente et synthétique issue du résultat de ces étapes.
3) Quelles sont les qualités requises pour exercer votre métier ?
La première qualité est un questionnement permanent sur le rapport de mes clients avec la société dans laquelle nous vivons. Ce qui oblige à avoir des points de référence à ce niveau et donc, d’avoir une certaine curiosité sur le monde. Par exemple, une des raisons pour lesquelles j’estime être pertinent dans le monde du luxe, c’est que j’apporte un regard extérieur à ce milieu. Par ailleurs, et là c’est une réflexion plus pratique, il faut savoir jongler entre le rythme du quotidien d’un client, qui est quasi toujours dans l’urgence, et le temps de la réflexion auquel on doit donner le temps de maturer.
4) Quelle formation faut-il suivre pour exercer ce métier ?
Très peu de personnes deviennent stratégistes compétents à la sortie de l’école car cela demande un peu de vécu. Je dirais, et ce n’est que mon point de vue, qu’une formation universitaire dans des domaines comme la littérature, l’histoire, la médiation culturelle sont intéressantes mais qu’elles ont besoin d’être complétées par une spécialisation en communication pour avoir des bases théoriques autour du concept de marque, marketing, agences, etc.
5) Qu’est-ce qui vous a attiré dans ce métier ?
Avant même le métier en lui-même, c’est le statut qui a motivé ma décision. En tant que freelance, je peux choisir mes jours de travail et les missions. Organiser mon temps comme je l’entends. Et c’est un luxe que je ne renie pas aujourd’hui. Ensuite, j’ai toujours été intéressé par notre rapport aux marques et être stratégiste est un poste qui permet de l’observer sous des angles variés.
6) Quel est le salaire brut annuel en début et fin de carrière ?
Le poste ne bénéficie pas, au début en tout cas, d’une meilleure valorisation salariale qu’un autre poste au sein de l’agence ou l’entreprise. Nous suivons donc une grille normale. Je dirai qu’un salaire de départ se situe aux alentours de 27K brut par an et peut monter au-delà des 100K brut par an pour des stratégistes avec beaucoup d’expériences.
7) Quelles sont les perspectives d’évolution ? Quels horaires faites-vous ?
Mon cas est un peu spécial du fait de mon statut de freelance. Les jeunes diplômés ont donc un statut Junior et passent Senior au bout de quelques années. Là où l’évolution peut être intéressante, c’est de sortir de schémas classiques d’agence (là où l’on trouve principalement le métier de planneur stratégique), et d’intégrer des structures d’innovation qui sont à la mode dans les grands groupes, notamment industriels. Les horaires pour un poste classique sont longs car se nourrir en recherche et le traduire de manière synthétique prend du temps. Mais une bonne organisation permet de se calquer sur les horaires en place, au sein de l’entreprise.
8) Ce métier permet-il un bon équilibre entre vie professionnelle et vie privée ?
Encore une fois, c’est mon statut qui m’apporte cet équilibre. J’ai pu noter qu’en période de forte activité, il m’était difficile de le maintenir, notamment parce que la réflexion intellectuelle nous accompagne au quotidien. C’est un vrai challenge de « lâcher prise » lorsque nous n’avons pas trouvé la clé qui rend tout le projet fluide et clair. De ce fait, je pense qu’il est primordial de prendre du temps pour soi et de se vider l’esprit afin d’avoir une certaine distance vis à vis des sujets sur lesquels nous intervenons.
9) Y a-t-il des spécificités au métier ? Si oui, lesquelles ?
Une des spécificités est d’avoir un poste à caractère intellectuel au sein de structures majoritairement opérationnelles. Comme je le disais plus haut, il y a cette nécessité de gérer en permanence entre son rythme et celui de la structure, de la même manière qu’il faut communiquer sur la valeur ajoutée de notre position en amont qui est parfois dévaluée par les besoins du quotidien.
10) Votre métier est-il un métier d’avenir ? Pensez-vous qu’il continuera à recruter pour les prochaines années ?
Je me suis beaucoup posé la question ces derniers temps et j’ai mes doutes. Je pense que la réflexion stratégique se rapproche de plus en plus du concept d’innovation car en période de crise économique, avoir une vision positive et créative sur l’avenir, même à court terme, rassure. Ainsi, je crois qu’une fois le contexte économique favorable, de retour, il y aura un besoin de combler le retard accumulé et dès lors, cela redeviendra la priorité. Je note qu’il y a encore quelques années les divisions innovations/R&D étaient vues comme de vrais laboratoires d’exploration et j’ai l’impression qu’aujourd’hui, nous sommes beaucoup plus pragmatiques avec elles, avec une vraie demande de résultat.
11) Quels conseils donneriez-vous aux étudiants désirant exercer ce métier ?
Rester curieux sur le monde, et dans le plus de domaines et cultures possibles est la meilleure des formations. Je termine souvent mes ateliers de créativité en disant que la créativité n’est pas innée mais un muscle et si on ne l’entraîne pas au quotidien, nous ne serons jamais créatifs. Il en est de même pour le fait d’être curieux. Cela inclut de ne pas forcément appréhender ses premières expériences professionnelles directement dans la stratégie mais de voir un éventail varié de structures, les start ups par exemple, et de métiers avant de se sentir prêt.
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