Devenir Transporteur d’organes (p2)
Par Hakim-
Publié le : 05/12/2023
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Lecture 6 min
"Pour devenir transporteur d’organes, le mieux est d’avoir déjà un pied dans le secteur et d’être habitué à la conduite en urgence"
Dans cette deuxième partie, nous partons à la rencontre d’Hakim pour qu’il nous parle de son métier de transporteur d’organes. Si vous n’avez pas lu la première partie, nous vous invitons à le faire pour que vous puissiez tout comprendre du métier :
1. Le témoignage de Carole, Responsable transport d’organe
2. L’interview d’Hakim, Transporteur d’organes
3. Déroulé d’une course pour la greffe d’un cœur
2ème partie : Interview d’Hakim, Transporteur d’organes (p2)
1) Bonjour Hakim, pourrais-tu commencer par te présenter en quelques mots ?
Bonjour, je m’appelle Hakim, j’ai 39 ans et 2 enfants. Avant d’être transporteur d’organes (ou appelé en interne « chauffeur greffe »), j’ai exercé d’autres métiers, dans la livraison et la vente de véhicules. J’ai ensuite rejoint 360 Degrés Services en 2015 puis au fur et à mesure de mes capacités, j’ai su évoluer jusqu’à devenir chauffeur greffe en 2017.
2) Quelles formations sont nécessaires pour devenir transporteur d’organes ?
Je recommande la formation que propose l’EFS (Etablissement Français du Sang) sur le transport de prélèvements ou celle de l’ADR (Accord pour le transport des marchandises Dangereuses par la Route).
Vous devrez également effectuer un stage de conduite d’urgence sur circuit. Pour ma part, je l’ai passé sur le circuit du Mans. Il y a aussi une formation en binôme qui est organisée avant la prise de poste afin de connaître les différents hôpitaux, leurs spécialités et le matériel que nous transportons. Si vous rejoignez 360 degrés services, vous recevrez ces formations.
3) Quelles sont les évolutions professionnelles du métier de transporteur d’organes ?
Devenir formateur pour tout nouvel arrivant ou devenir régulateur.
4) De quoi parle-t-on lorsqu’on parle d’avoir une bonne conduite ?
Tout le monde à la capacité de conduire rapidement mais ce n’est pas ce qui est attendu par la Direction. Avant toute chose, on nous demande une conduite souple et prudente, c’est-à-dire respecter les autres usagers de la route (voitures, cyclistes, trottinettes, motards….).
Créer un accident pour en sauver une autre n’est pas notre mission. Un transport doit donc se passer en toute sécurité.
5) Vous conduisez sans GPS. Pour quelle raison ?
Le GPS peut diminuer mon attention et l’écouter sans réserve pourrait m’amener à passer par de petites rues alors qu’il faut justement les éviter. En effet, le risque est de s’y retrouver bloqué et de ne pas pouvoir trouver une alternative pour s’en sortir. C’est la raison pour laquelle j’emprunte toujours les grands axes. Par ailleurs, le GPS ne prend pas en compte la possibilité de faire de l’interfile (= rouler entre 2 voies) en cas d’embouteillage. Lorsqu’on est escorté par les policiers, ce sont les forces de l’ordre qui nous ouvrent le passage.
6) A quel salaire peut prétendre un transporteur de greffons en début de carrière ?
Hors prime, il peut tourner à 1600€ net par mois.
7) Comment s’organise votre emploi du temps ? Est-ce conciliable avec une vie de famille ?
Je travaille « en 5-5 » : 5 jours de travail puis 5 jours de repos donc c’est tout à fait compatible avec une vie de famille.
Il est à noter que j’ai également des astreintes. Il existe 3 types d’astreintes :
- Mon horaire de début de service peut être avancé en cas de besoin
- Celle pour remplacer un collègue qui est en congés
- Celle pour du renfort d’équipe (en cas de pics d’activités)
J’ai un planning de base assez stable, 6H – 17h avec une heure de pause déjeuner.
Il m’arrive cependant, en cas de besoin, que je dépasse cette amplitude horaire pour assurer la continuité de mes missions.
8) Ne voudriez-vous pas être transporteur d’organes dans une ville autre que Paris, là où la circulation y est moins dense ?
Pas vraiment car c’est à Paris que se situe le cœur de l’activité. C’est là en effet qu’il y a le plus d’hôpitaux.
9) Combien de km faites-vous par jour ?
Je fais environ 200km par jour soit 1 000km par semaine.
10) Pensez-vous que le métier de transporteur d’organes recrutera dans les prochaines années ? Est-ce un métier d’avenir ?
Il y aura toujours de l’activité dans ce domaine, il se peut que certaines technologies (comme les drones) prennent une part de nos transports mais je ne pense pas que ce soit la solution pour tout.
11) Existe-t-il des passerelles entre transporteur d’organes et ambulanciers par exemple, ou même VTC voire chauffeur de bus ?
Les ambulanciers sont tout à fait capables de devenir transporteur d’organes directement. Cependant l’inverse n’est pas possible car pour être ambulancier, il faut passer un diplôme.
Pour VTC ou chauffeur de bus, ce sont des métiers différents car il n’y a pas de conduite en urgence. Ces métiers ne donnent donc pas accès directement au poste de transporteur d’organes. Mais à l’inverse, si je le souhaitais, je pourrais devenir VTC.
12) Au final, vous côtoyez indirectement en permanence la mort…
En effet. Cela fait relativiser. Côtoyer la mort indirectement permet de prendre un certain recul. Il faut aussi se rappeler que donner ses organes peut permettre de sauver plusieurs vies et que le métier de transporteur d’organes y contribue, même indirectement en effet.
13) Qu’est-ce que vous aimez le plus et à l’inverse, qu’est-ce que vous aimez le moins dans votre métier ?
Ce que j’aime le plus dans mon métier de transporteur d’organes, c’est l’autonomie, me sentir utile et avoir la confiance que mon entreprise me donne.
On nous fournit les bons outils pour bien faire notre travail grâce à une hiérarchie qui connait le terrain, nos contraintes et nos difficultés. Les régulateurs assurent un bon fonctionnement et cela se ressent sur le terrain. C’est agréable de travailler dans ces conditions : par exemple, notre flotte de véhicules est renouvelée tous les 2 ans ce qui nous permet de disposer de véhicules performants et neufs.
Dans ce que j’aime moins en revanche, c’est la circulation parisienne et le fait qu’il peut y avoir parfois de longues attentes avant un transport urgent.
La voiture d’Hakim pour transporter des organes
14) Quels conseils donneriez-vous pour devenir transporteur d’organes ?
Déjà, il faut savoir qu’il y a plus de demandeurs que de postes. Du coup, même si vous n’êtes pas rappelé après votre candidature, ça ne veut pas dire que votre profil n’est pas intéressant. Cela signifie juste qu’il n’y a pas de postes ouverts.
Pour devenir transporteur d’organes, le mieux est d’avoir déjà un pied dans le secteur et d’être habitué à la conduite en urgence : ambulancier, pompier etc. sont des métiers qui s’y prêtent. Il ne s’agit pas d’être Schumacher bien évidemment mais il faut savoir conduire sous pression et sans accrocs.
Enfin, je conseillerais aux futurs transporteurs d’organes d’avoir une bonne hygiène de vie : on passe beaucoup de temps au volant donc c’est important de faire un minimum de sport à côté. Cela évitera des problèmes de dos. Par ailleurs, se coucher tôt est aussi important car il ne faudrait pas s’endormir en conduisant !
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